Nous avons interviewé Marta Grañó, chercheuse et divulgatrice en éducation et initiative entrepreneuriale. Elle combine son activité d’enseignante à l’ESADE en tant que collaboratrice académique et tutrice dans des matières d’entrepreneuriat avec son travail de recherche pour un doctorat sur l’éducation et l’initiative entrepreneuriale. Elle est diplômée en administration des affaires et en gestion d’entreprises ainsi qu’en MBA de l’ESADE.

L’éducation ne cesse d’évoluer, et de nos jours, il est courant d’entendre des concepts comme l’éducation basée sur les valeurs, les projets ou les intelligences multiples qui doivent se développer en classe, quelles seront les clés de l’éducation dans les prochaines années ?

Marta Grañó : L’éducation va changer, et beaucoup. Personnellement, je suis convaincue que les changements viseront à personnaliser l’éducation pour chaque élève, à améliorer la formation en compétences et à entrer dans un système de formation continue, indispensable dans notre « société de l’apprentissage » pour nous adapter aux changements qui se produisent en permanence.

Pour y parvenir, de nouvelles approches pédagogiques sont introduites, telles que l’éducation émotionnelle et la reconnaissance des intelligences multiples de Gardner, et de nouvelles compétences éducatives sont développées, telles que la compétence de « apprendre à apprendre » et la compétence de promouvoir « le sens de l’initiative et l’esprit entrepreneurial ».

Parvient-on à progresser vers un apprentissage personnalisé qui exploite les qualités et capacités de chaque élève ? Comment ?

Marta Grañó : L’éducation a pour objectif de permettre à chaque enfant d’atteindre son plein développement personnel dans tous ses aspects. Il est donc nécessaire non seulement de lui fournir des contenus qu’il doit apprendre ou mémoriser, mais aussi de créer des itinéraires d’apprentissage personnels adaptés à chaque élève.

L’apprentissage personnalisé repose sur le principe que chaque personne est différente et apprend de manière distincte, et des progrès sont réalisés dans ce domaine. Cela nécessite un effort important de la part des établissements et des enseignants dans ce processus, où ils ne sont plus de simples transmetteurs de connaissances, mais aussi des coachs de leurs élèves, dans le sens où ils doivent non seulement enseigner, mais aussi créer les conditions nécessaires pour apprendre et grandir.

La salle de classe traditionnelle cède peu à peu la place à d’autres configurations et possibilités dans la relation entre l’élève et l’enseignant ainsi qu’entre les élèves eux-mêmes. Quel est l’impact du mobilier dans ce sens ? Quelles sont les besoins réels auxquels il doit répondre ?

Marta Grañó : L’environnement physique dans lequel se déroulent les cours a un impact sur l’apprentissage, c’est certain. Cela m’a toujours étonnée de voir tant d’établissements avec des salles identiques à celles dans lesquelles j’ai étudié il y a tant d’années. Avec les changements si significatifs qui se sont produits dans le monde, comment se fait-il que les salles soient toujours disposées de la même manière qu’il y a des décennies, avec des tables et des bureaux alignés uniformément face au tableau et à l’enseignant ? Ce type de salle a été conçu pour offrir une éducation basée sur la transmission de connaissances, un système fondé sur l’écoute et la répétition des réponses.

Mais aujourd’hui, répéter des réponses ne suffit plus. Dans un monde où tout change rapidement, le système d’apprentissage est différent, et les élèves ont désormais une participation plus active dans leur apprentissage, le travail en groupe est important, des compétences comme la communication doivent être renforcées… et tout cela nous mène à un modèle de salle de classe qui favorise une plus grande interaction entre les élèves et stimule la créativité des enfants.

Des tables et des chaises qui peuvent être disposées de différentes manières, en fonction du travail effectué à chaque moment, des espaces confortables où les élèves peuvent travailler individuellement ou en groupe, et des zones permettant des présentations publiques des élèves.

L’université britannique de Salford a analysé l’impact que l’aménagement de la salle a sur le processus d’apprentissage, et a conclu qu’une salle dans des conditions optimales peut améliorer de 25 % les performances des élèves.

Dans quelle mesure les qualités et la distribution de ce mobilier sont-elles importantes selon les étapes éducatives, comme l’école maternelle, le secondaire et l’enseignement supérieur ?

Marta Grañó : Chaque âge a ses besoins spécifiques. Bien qu’ils partagent certains éléments communs, comme les zones de travail en groupe ou l’importance de la lumière naturelle dans les salles de classe, il est évident que les salles de l’école maternelle nécessitent des zones de jeu, des coussins grands et un mobilier adapté à leur âge.

Pour les plus âgés, en plus de la polyvalence des salles, la création d’une zone avec des gradins pour faciliter la communication est une excellente idée, car elle contribue à stimuler la proactivité des enfants, les aide à prendre l’habitude de parler en public devant d’autres personnes et souligne que les protagonistes sont eux, les élèves.

Quels conseils donneriez-vous aux établissements et enseignants qui souhaitent aménager une salle de classe pour l’année prochaine ?

Marta Grañó : Pour améliorer l’aménagement des salles de classe, il est toujours une bonne idée de visiter d’autres établissements qui ont déjà entamé ce processus, pour voir « sur place » à quoi ressemblent les nouvelles salles et observer comment les élèves s’y déplacent. Ensuite, il est important d’analyser en détail pour évaluer si le système adopté dans ces établissements est le meilleur pour le mien, car il est possible que certains aspects soient très valables, mais probablement d’autres non.

Lors de vos conférences destinées aux enseignants, quelles sont leurs préoccupations principales en général et, en particulier, en ce qui concerne le mobilier ?

Marta Grañó : Aux enseignants, en tant que professionnels de l’éducation, il leur est important de savoir quelle configuration de salle fonctionne le mieux avec les élèves, et leurs questions vont généralement dans ce sens.

Ils me demandent particulièrement des informations sur les gradins, mais aussi sur la zone des enseignants dans ce type d’établissement, qui est souvent une sorte de « bocal », à côté de la salle, séparée visuellement par une vitre.

Que le monde ait changé n’est pas une nouveauté, et que de nouveaux modèles éducatifs soient nécessaires non plus. Il est maintenant temps de passer à la pratique et de travailler dans le cadre des nouveaux systèmes. Les méthodologies pédagogiques évoluent. Si l’on voit que les bibliothèques ou les musées ont introduit des changements architecturaux pour s’adapter aux nouveaux temps, il est évident que les écoles devront également faire de même. La transformation de la salle de classe fait partie intégrante du changement éducatif.